Par Virginie Achouch - docnews.fr
Vendredi dernier, lors du tournoi de Roland-Garros, nous avons rencontré Bruno Patino, directeur général délégué aux programmes, aux antennes et aux développements numériques. Il nous a parlé de télévision à l'ère du numérique.
Après la plateforme Pluzz, puis l'application Francetv Info et plus récemment son écran compagnon (sur Francetv Info), ses programmes transmedia, France Télévisions poursuit ses innovations. Partenaire et diffuseur officiel de Roland-Garros, France Télévisions propose cette année encore des contenus numérique sur tous les écrans, comprenant une offre enrichie de TV connectée, une offre "multi-courts" composée de 7 chaînes évènementielles (pour suivre le direct), de nombreux contenus surfrancetvsport.fr et plusieurs innovations technologiques via le RG Lab (mises en œuvre en partenariat avec la Fédération Française de Tennis).
Avec la modification des usages, les audiences se sont fragmentées. Comment France Télévisions appréhende cet enjeu ? Comment mesurez-vous cette audience sur les différents écrans ?
Bruno Patino : Nous avons décidé de choisir la politique d’hyper-distribution, c’est-à-dire, qu’à partir du moment où l'on observe une fragmentation, on a envie de répondre à tous les usages.
France télévisions est un service public, donc au service des usages du public. Notre but est quel que soit votre usage, quelques soient les technologies que vous avez choisies, vous devez pouvoir regarder ce que France Télévisions a à vous proposer.
Nous avons choisi de suivre une logique d’hyper-distribution sur toutes les plates-formes, toutes les technologies et tous les niveaux d’entrée de connexion. Imaginons, un foyer qui reçoit la télé sous IP, qui par ailleurs a un téléviseur connecté, a souscrit une box du type Apple TV et qui a une Xbox, sur chacun de ces outils, mon idée est qu’il y ait les programmes de France Télé. Quelques soient les chemins d’accès vers la connexion, vous pourrez rencontrer les programmes du groupe.
Quant à la mesure de cette hyper-distribution, pour l’instant nous sommes clairement dans l’artisanat, car nous avons des instruments de mesure différents donc avec des logiques différentes. Nous mesurons des choses très différentes à des moments différents et il faut que manuellement nous additionnions tout cela.
Cela va prendre encore une bonne année avant que l’on soit capable de façon pratiquement automatique d’avoir tous les usages sur toutes les plates-formes d’un seul et même programme.
Quelles sont, selon vous, les expériences les plus réussies pour capter les différentes audiences ?
Bruno Patino : Ce qui fonctionne le mieux aujourd’hui dans la mise à disposition c’est la mobilité, depuis lors que nous avons développé nos plates-formes mobiles dans cet univers-là, le re-visionnage de rattrapage augmente.
Par ailleurs, je reste persuadé que lorsqu’on socialise les programmes, que nous proposons des expériences augmentées cela leur donne un écho extrêmement fort. Cela leur permet d’avoir une rémanence dans l’audience beaucoup plus forte.
Vous avez déjà réalisé de nombreux programmes tels que « The End » ou encore « Théâtre sans Animaux » autour des Nouvelles Ecritures ?
Bruno Patino : Ma conviction, c’est qu’à un moment ou à un autre, les formes narratives qui sont développées dans l’univers numérique vont finir, non seulement par être ce qu’elles sont déjà aujourd’hui, en parallèle des formes narratives télévisuelles, mais en plus, rentrer dans l’univers télévisuel. Nous sommes vraiment à cette orée là. Les nouvelles écritures, vous mentionnez le théâtre, je citerai des réalisations faites sur des séries documentaires, sur des plates-formes de témoignages ou sur des sortes de serious game sur l’organisation de votre emploi du temps, qui ont permis d’avoir des formes narratives d’accompagnement de programme TV très nouvelles.
Quel est le dispositif mis en place sur Roland-Garros ?
Bruno Patino : Roland-Garros est toujours pour nous un lieu d’innovation. C’est un lieu où nous lançons des choses prototypales. On y a lancé notre télévision connectée, il y a deux ans, aujourd’hui nous montrons nos services de TV connectée qui sont plus puissants, plus intuitifs qu’ils ne l’étaient alors.
Cette année, nous expérimentons la super HD, le 4K qui offre des images absolument incroyables, nous diffuserons un match en direct.
Nous expérimentons par ailleurs la Lifi, le wifi par la lumière qui permet de développer la mobilité vidéo de façon extraordinaire sans être soumis aux rayonnements des ondes.
Existe-t-il une télévision ou une chaîne étrangère qui vous inspire ?
Bruno Patino : Ce sont plutôt des programmes. Je suis très client de séries télévisuelles et je suis très marqué par des séries où l’on voit l’univers narratif être un peu bousculé par l’irruption du téléspectateur. Et même si ce n’est pas par l’univers numérique, là en ce moment, je finis de voir la première saison de House of Cards diffusé sur Netflix, je trouve cela extraordinaire.
Que pensez-vous de l’annonce du lancement des chaînes Youtube ?
Bruno Patino : C’est logique. Les chaînes YouTube c’est pour moi trois choses, c'est à dire petit à petit, on va dans le media qui est à la fois industriel et personnalisé. C’est ce qu’on appelle le media de précision, qui est ultra thématisé, dans lequel la notion de programmation peut être faite par l’algorithme ou par l’individu multiple et sur des plates-formes dont les usages sont absolument majeurs. Les chaînes YouTube, c’est évidemment pour moi, la grande révolution audiovisuelle de ces derniers mois, bien plus que la création de six nouvelles chaînes de la TNT ou autre.
Propos recueillis par Virginie Achouch